Guapi,
Colombie

Les leaders de Guapi et Profamilia promeuvent la santé et le bien-être le long de la rivière

À Guapi, Profamilia travaille main dans la main avec les dirigeants locaux, les sages-femmes et les soignants pour renforcer les droits de santé sexuels et reproductifs (DSSR) ainsi que la santé mentale.

Au cours de notre visite, nous avons assisté à un atelier extrascolaire animé par le programme national de Profamilia, Red Joven (Réseau des jeunes), qui permet aux adolescent•es d'acquérir les connaissances et les compétences nécessaires pour prendre des décisions éclairées concernant leur corps, leurs relations et leur avenir. Grâce à des activités interactives, des jeux de rôle et des discussions ouvertes, les adolescent•es de Guapi ont appris des choses sur la contraception, les relations saines et l'autosoin, faisant de l'éducation en matière de DSSR une part intégrale et attrayante de la vie de tous les jours.

Red Joven a distribué des documents de lecture soulignant qu' "il est normal de se poser des questions sur son corps et sa sexualité" -et qu'aucune question n'est interdite. Les adolescent•es ont été encouragés à poser des questions sur tous les sujets, de la contraception à la masturbation en passant par l'orientation sexuelle, renforçant ainsi l'importance d'un dialogue sans menace et sans jugement.

"La rivière est la mère et le chemin. Elle nous donne de la nourriture, du réconfort et de la sagesse."

Nous avons également rencontré le maire de Guapi, Gil Milena Grueso Romero, qui nous a présenté le programme de santé mentale de la ville, qui pourrait être traduit par "Santé mentale pour votre communauté". Élaboré avec Profamilia et des dirigeants locaux, ce programme met en avant le rôle central des femmes leaders, des soignantes et des guérisseuses, comprenant santé mentale comme quelque chose de collectif et ancré dans la culture. Dans le cadre de ce programme, plus de 100 responsables ruraux des rivières Guajuí, San Francisco et Napi ont participé à des ateliers sur l'autogestion de la santé, la prévention de la violence sexiste et le soutien psychologique.

L'un des outils d'apprentissage les plus efficaces du programme est le "fleuve de la parentalité",  une métaphore qui permet de réfléchir aux cycles de violence au sein des familles et des communautés. Créé collectivement par des leaders afro-descendants des zones urbaines et rurales de Guapi, cet outil enseigne que l'attention et le respect peuvent conduire les enfants vers des "eaux calmes" qui les nourrissent, alors que la violence les pousse vers des eaux troubles.

Cet outil a été adapté sous forme de brochures, d'affiches, de présentations PPT et de vidéos à utiliser dans les lieux de réunion, les écoles et les foyers. En voici un extrait :

"Dans ses eaux calmes, nous apprenons à nous soucier de l'amour, mais lorsqu'il s'agite ou déborde, il peut aussi nous blesser et nous éloigner".

"Élever des enfants, c'est comme naviguer sur une rivière ; parfois elle coule calmement, parfois elle devient trouble.

C'est pourquoi nous n'élevons pas nos enfants seuls. Nous avons besoin d'une communauté, de mots, de chansons et de mains solidaires. Parce que nous sommes tous les gardiens de la rivière qui nourrit et qui nous guide".

La sage-femme ou la résistance culturelle

Le rôle des sages-femmes et des guérisseuses traditionnelles est un autre élément clé de l'approche Guapi. Dans une école locale, nous nous sommes réunis avec des sages-femmes et des membres de la communauté autour d'un grand cercle pour écouter comment les connaissances sur la grossesse, l'enfantement, l'autosoin et la santé des femmes ont été transmises de génération en génération et sont encore vitales aujourd'hui.

Nous avons participé à un exercice énergique, semblable à un cercle de tambours, au cours duquel chaque personne, à tour de rôle, a donné un exemple de la manière dont elle prend soin d'elle-même - que ce soit en lisant, en dormant suffisamment ou en surveillant sa santé grâce à des visites régulières chez le médecin - pendant que tout le monde frappait des mains, jouait du tambour et chantait à l'unisson.

Emmanuel Rivas, journaliste à FPNN, s'est entretenu un long moment avec Marcelina Solís,sage-femme de plus de 46 ans d'expérience et qui incarne cette tradition vivante du soin.

"J'ai appris tout ce que je sais de ma mère", explique Marcelina. "Je continue à m'occuper des femmes enceintes et ma petite-fille veut apprendre elle aussi."

Comme le dit Emmanuel, "pour les femmes de Guapi, la profession de sage-femme n'est pas seulement une profession, c'est unhéritage ". Les sages-femmes apportent un soutien physique et un accompagnement émotionnel, en préparant des boissons médicinales, en pratiquant des rituels pour renforcer le corps et l'esprit, et en veillant à ce que les futures mères reçoivent des soins en cas de complications.

Dans une ville où l'accès aux services de santé est limité et où la rivière est souvent la seule voie d'accès au monde extérieur, les sages-femmes et les services de santé de partenaires tels que Profamilia sont essentiels. Ils contribuent à la prévention des grossesses précoces, au dépistage de maladies telles que le papillomavirus et à l'offre de soins culturellement ancrés, mêlant connaissances ancestrales et médecine moderne.

Enseignements pour la communauté mondiale de la santé sexuelle et reproductive

Guapi rappelle aux professionnels de la santé et des droits sexuels et reproductifs du monde entier :

• La culture renforce les soins et les connaissances ancestrales enrichissent les systèmes de santé.
• Les espaces sûrs pour les jeunes normalisent les questions relatives à la sexualité et à la santé, rendant ces conversations plus faciles à tenir.
• La responsabilité partagée du bien-être de la communauté renforce la santé mentale et physique.

Qu'il s'agisse de sages-femmes mêlant connaissances traditionnelles et médicales, d'adolescentes apprenant à utiliser la contraception par des exercices ludiques ou de communautés qui décident de donner la priorité à la santé mentale, Guapi offre un modèle d'intégration de l'identité culturelle, de la résilience et de la santé.

La ville nous rappelle que la prise en charge des femmes, et du reste de la communauté en général, ne consiste pas seulement à fournir des services, mais aussi à honorer les traditions, à favoriser la joie et à célébrer la vie. Participez aux conversations sur ce travail important à l'occasion de ICFP 2025 du 1er au 6 novembre.